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25 janvier 2008 5 25 /01 /janvier /2008 15:59
Fra Baywheel, devenu Lucky Luke avait échangé son Colt pour une Gatling* car il avait compris que les galopins télégraphistes et les mages-toupies ne réagissaient qu’aux décibels. Comme c’était un homme calme, il ne tirait que de courtes rafales mais cela avait suffi pour lui attirer toutes les attentions. Ma Dalton était fâchée contre tout le monde (comme d’habitude) et surtout contre le Colonel ; elle avait enfoui son Colt au fond de son sac et repris son tricot.

La Grande Squaw ne savait que faire de ses Grands Sachems qui se comportaient comme bétail en corral. Tout le monde sait que, même bien nourris et abreuvés, les bovidés domestiques passent leur temps à se donner des coups de cornes et à se piétiner, voire à agresser leur propriétaire. C’est ce qui se passait mais ça n’intéressait personne. La Grande Squaw rêvait en silence de buffalos sauvages qui auraient accompagné les chevauchées de son étalon blanc, et avait même ressorti le Stars and Stripes en espérant galvaniser le peuple.

Le colonel était lui aussi devenu national au moment où il allait perdre l’étoile de Super shérif des National Guards, mais il multipliait les erreurs de commandement : a-t-on déjà entendu un officier déclarer « faites-moi confiance, je ne vous trahirai pas », et se plaindre de tout ce qu’il avait souffert ? Le Général Chuck Grant aurait certainement laissé tomber : « un officier n’a rien d’autre à dire que : on y va ».

Les officiers du 22ème n’étaient pas plus passionnants que les Grands Sachems et on les entendait peu, sans doute de peur de déclencher la colère du Colonel qui ne paraissait pas très serein malgré ses rodomontades. En fait, tous craignaient de s’affronter directement et Lucky Luke avait beau jeu d’agiter sa Gatling sous leur nez.

Plutôt que de combattre le Général Pen Lee, la Grande Squaw et surtout le Colonel se rapprochaient dangereusement de ses manies, or l’art de la guerre enseigne que l’on perd toujours lorsqu’on se laisse entraîner sur le terrain de l’adversaire. Les Sudistes étaient silencieux et les mages-toupies ne les percevaient pas, pourtant il se disait que leurs partisans étaient de plus en plus nombreux.
 
Tout le monde annonçait la victoire du Colonel, les Indiens les plus affamés commençaient à se rallier, les partisans de Lucky Luke couraient aussi à la soupe, les Sudistes n’y tenaient plus, la confusion était à son comble et c’est la fin des Tuniques Bleues ; vous en aurez quand même eu deux douzaines … Dans une quinzaine de jours viendra l’épisode suivant : La Ruée vers l’Or et en attendant quelques leçons d’économie … Bien sûr, DDR reste fidèle au poste.

* Mitrailleuse perfectionnée à plusieurs canons.

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25 janvier 2008 5 25 /01 /janvier /2008 08:58
Ma Dalton allait se révéler en ennemie implacable contre Lucky Luke, résultat d’un vieux règlement de comptes provenant d’élections précédentes. Le Colonel était un collectionneur invétéré : il lui fallait tout et le reste. Les chariots du 22ème de Cavalerie étaient surchargés de tout ce que Washington comptait de has been et autres out of service, le convoi cheminait de plus en plus lentement et Nike Stark s’impatientait ; il emmena pourtant aussi Ma Dalton.
 
Ma Dalton avait été une femme énergique, courageuse et rebelle : elle n’hésitait pas dans sa maturité à désigner du canon de son Colt les représentants à qui elle enjoignait de voter pour les progrès de l’Union et de la Superunion qu’elle avait décidés au grand dam des conservateurs. Elle avait aussi fait beaucoup pour la condition des squaws et en avait recueilli un immense respect, mais la vieillesse est un naufrage, même pour les meilleur(e)s …
 
Hélas, elle arrivait à l’âge auquel on doit se mettre à sa table de travail pour écrire des mémoires qui éclaireront les nouvelles générations. Au lieu de cela, elle continuait à battre les estrades comme au temps du référendum pour la Superunion où, faute de parvenir encore à glisser les balles dans le barillet, elle avait accablé de coups de parapluie les électeurs récalcitrants : un combat de trop pour un échec retentissant. Cela allait-il se reproduire ? Sic transit …
 
Elle attaquait durement Lucky Luke mais ses coups n’étaient plus ajustés comme auparavant. Celui-ci cheminait tranquillement sans escorte et sans s’occuper des balles perdues, reprenant ainsi l’attitude de liberté qu’affichait il y a peu la Grande Squaw maintenant reprise en main par les Grands Sachems.
 
Ces derniers, amollis par l’eau de feu et les calumets de la paix qu’ils fumaient d’autant plus souvent qu’ils se disputaient sans cesse, ne savaient plus se battre, tout comme les officiers du 22ème trop habitués à être transportés dans des chariots moelleux et à faire bonne chère. Les électeurs de l’Union étaient en train de le comprendre.
 
Pendant ce temps, le Général Lee Pen faisait manœuvrer ses Sudistes à couvert des galopins télégraphistes et des mages-toupies. Le danger était partout pour le Colonel : la Grande Squaw pouvait retrouver sa liberté et sa fougue, Lucky Luke ne se dispersait pas dans l’ailleurs et le lendemain ; il était, comme on dit en américain, dans le hic et nunc.
 
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24 janvier 2008 4 24 /01 /janvier /2008 09:08
Les armées étaient maintenant à la recherche du temps perdu. Une seule chose était certaine : rien n’était certain. Les Grands Sachems à la triste figure avaient enfin compris que, s’ils ne se battaient pas maintenant, ils tiendraient leur prochain congrès dans une réserve à pemmican. Leur ralliement à la Grande Squaw semblait cependant se faire plus ou moins à l’insu de leur plein gré.
 
Tout allait vite en restant sur place. Un Grand Sachem épicier (ou quaker selon la terminologie officielle), ombrageux comme une jouvencelle à l’égal de ses pairs, venait de déserter à grand fracas. Au bout de deux jours, on ne distinguait même plus sa silhouette dans la Grande Prairie.
 
Un galopin télégraphiste un peu exalté titrait une de ses dépêches « La campagne s’accélère ». Mais les galopins qui avaient souvent échappé à la conscription ne connaissaient rien à la guerre. En fait d’accélération, on était dans les deux camps en plein cafouillage des dispositifs.
 
Le Colonel et la Grande Squaw étaient en pleine forme mais on sentait que leurs troupes n’avaient pas très envie de se battre : quelques escarmouches, quelques explosions qui n’étaient que des coups de réglage d’artillerie. Bien sûr, le 22ème de Cavalerie, qui était le plus puissant, donc le plus exposé malgré tous ses appuis, avait tendance à tirer tous azimuts, mais il n’y avait même pas de quoi courber la tête sur le chemin d’une corvée de popote.
 
Rien à voir avec les robustes chefs de guerre qu’avaient été le Colonel Jack Shyrock et le Grand Sachem Sème à Tout Vent, qui savaient galvaniser les troupes les plus médiocres. La Grande Squaw, qui galopait avec grâce, abhorrait les cœurs faibles, donc une grande partie de ses chefs indiens, et le Colonel, à force d’interpréter des refrains empruntés à tous les répertoires, ressemblait de plus en plus à un chanteur d’opérette.
 
Le combat aurait-il seulement lieu ou allait-on assister à ce que l’on appellera plus tard une « drôle de guerre » ? Impossible de le dire, nous étions au moment où les choses peuvent basculer dans un sens ou l’autre, ou stagner en équilibre. Mais un outsider obligeait à se poser la question suivante : Fra Baywheel sera-t-il Lucky Luke ou Buffalo Bill ?
 
Fra Baywheel devait une partie de son succès à sa traque des Dalton des télégraphes mais il n’était pas encore parvenu à les enfermer dans le pénitencier. Il avait ensuite, sans plus de précision, affirmé qu’il pourrait collaborer avec un Grand Sachem supplétif, par exemple le plus vaniteux d’entre eux : Mocassins Dorés, Il avait ainsi pris une allure de Lucky Luke.
 
Mais les Indiens l’accusaient de servir de pathfinder  au 22ème de Cavalerie et même de tirer les buffalos à leur détriment pour les affamer. Ne serait-il alors que le célèbre William Cody, dit Buffalo Bill ? D’autant plus que les troupes du Colonel ressemblaient de plus en plus au Ringling Bros and Barnum & Bailey Circus, dont Buffalo Bill vieillissant était une star. Un certain nombre d’indiens luxueusement emplumés pourraient s’y produire avec lui, c’était le célèbre groupe de jongleurs Spartacus.
 
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23 janvier 2008 3 23 /01 /janvier /2008 08:36
Fra Baywheel était décidément un homme curieux : presque toutes ses troupes avaient rejoint le mess du 22ème de Cavalerie et ses délices culinaires, Un vieux clown qui ne faisait plus rire que les croque-morts de l’Union venait de s’y ajouter et les rares fidèles qui restaient ne quittaient pas les salons surannés de l’université de Potsciences. Les transfuges avaient ainsi rejoint d’ex intellectuels aux cerveaux ramollis par le caviar, le Dom Pérignon et les excès de chère et de chair en tous genres.
 
Ce pauvre homme avait tout contre lui : au moment où chacun pillait les tombes, il n’avait même pas de fantôme présentable. Le plus cher à ses yeux était Rob Schoemender, initiateur de la Superunion, mais il était hors de question de l’évoquer devant le peuple.
 
Il se référait parfois, horresco referens, au Général Chuck Grant mais cela revenait à renier ses prédécesseurs médians et il était hors de question qu’il en appelle aux mânes du Grand Sachem Sème à Tout Vent, qui avait régné durant quatorze ans ; c’était l’impasse.
 
Il ne lui restait à évoquer qu’une guerrière des temps lointains mais, brûlée par les Anglais, traîtres récidivistes perpétuels, elle n’avait même pas de sépulture. Il fallait de plus qu’il la partage avec les Sudistes, qui en avaient fait une oriflamme depuis de longues années.
 
Pour couronner le tout, les galopins télégraphistes qui s’étaient entichés de lui et ne supportaient les candidats qu’alliés aux puissants, étaient prêts à révéler qu’éleveur de pur-sang, il serait l’ami des robber barons du télégraphe, ceux-là même qu’il avait tant conspués.
 
Et, cerise sur le pudding, un archéogalopin télégraphiste se faisait interdire de manipulateur pour avoir indiqué qu’il apportait sa voix à Fra Baywheel. Ce galopin, qui s’était toujours trompé sur tout, était d’ailleurs de mauvais augure pour le candidat. Les fils des télégraphes avaient chauffé au rouge à cette nouvelle, ce qui prouvait à quel point les galopins télégraphistes voyaient le monde par le gros bout de la lorgnette.
 
Bientôt, la Grande Squaw et Fra Baywheel allaient se retrouver dans la même situation : sans troupes et sans passé. C’était peut-être leur chance et, en ce qui concerne ce dernier, il était devenu Lucky Luke contre les Tuniques Bleues ; personne n’aurait jamais osé imaginer cela.
 
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22 janvier 2008 2 22 /01 /janvier /2008 17:55
Il ne se passait toujours rien, à part une extraordinaire profanation des cimetières ; la confrontation tournait au match des fantômes. Faute de discerner quoi que ce soit devant eux, les candidats tentaient de s’ancrer dans le passé en oubliant que les Sudistes étaient les vrais dépositaires de la nostalgie.
 
Comme une nichée de chiots se disputant de vieux chiffons, restes de grands uniformes, les partisans de la Grande Squaw et du Colonel s’agitaient et grognaient en tous sens, rendant leurs comportements illisibles, sauf pour les galopins télégraphistes, grands experts pour habiller les illusions d’un peu de réalité apparente.
 
Le Colonel était aux îles comme d’autres vont aux eaux. Il était toujours aussi merveilleusement universel, transversal et rassembleur, il n’attaquait même plus la Grande Squaw parce qu’il était en outre devenu le plus gentil, mais son état-major ne savait plus très bien comment rattraper ses envolées.
 
Il était visible que les Grands Sachems ne voulaient pas le pouvoir, surtout sous l’autorité de la Grande Squaw. Il avaient pour la plupart des fonctions rémunératrices qui leur suffisaient dans une Union potentiellement turbulente : les Présidents d’Etats et de Districts faisaient tracer à grands frais des routes de CGV* pour rejoindre au plus vite leurs maîtresses de Washington, les autres caciques qui venaient de somnoler confortablement durant cinq ans n’étaient tout simplement pas encore réveillés.
 
Les officiers du 22ème de cavalerie étaient plus avides et, en vue de la victoire promise, se disputaient déjà les prébendes et honneurs futurs. Heureusement, la Colonelle veillait et, tenant son ombrelle brodée d’une main et sa cravache de l’autre, mettait un peu d’ordre dans ces affrontements plus ou moins feutrés d’ambitions.
 
Il était clair que plus personne n’y voyait clair. Les comparateurs de télégraphes ne donnaient que radotage, touillage et triturage ; le peuple était en passe d’attraper la rage. Ce peuple qui, tant de fois trompé dans le passé, n’espérait certainement pas y trouver le salut.
 
* CGV : Chariots à Grande Vitesse.
 
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21 janvier 2008 1 21 /01 /janvier /2008 17:42
La Grande Squaw était bien là pour son grand feu public, parée de ses peintures de guerre rouges. Elle était apparemment parvenue à maîtriser les Grands Sachems qui avaient en revanche quelque peu pollué son discours. Devant son courage et son ascendant, les galopins télégraphistes avaient été un moment tétanisés et certains lui avaient même décerné quelques éloges.
 
Elle aurait été en grand danger s’ils avaient continué car, même si la révolte du peuple lors du dernier référendum de l’Union était un grand tabou, il était patent que les galopins n’avaient plus de crédibilité malgré leurs grands moulinets de sabres de bois. Mais une autre corporation s’était manifestée pour occulter les succès de la Grande Squaw : c’était celle des maîtres-épiciers*, encore appelés, souvenez-vous, quakers.
 
C’est que, dans l’Union, il n’était plus question que de banknotes et de shareholders. Plus personne ne voulait produire car c’était trop compliqué et fatigant ; chacun voulait acheter n’importe quoi n’importe où et le revendre au quadruple à n’importe qui. Les riches préféraient rejoindre des populations arriérées, par exemple en Confédération Hermétique, voire se faire naturaliser Belges, plutôt que de participer aux efforts de l’Union.
 
Les maîtres-épiciers applaudissaient ; ils étaient devenus la pierre de touche de tout ce qui se faisait de bien. Foin d’espoirs et de volontarisme, foin d’efforts et de long terme, on subventionnait l’inactivité pour que l’Union ait encore l’air un peu accueillante, mais on subventionnait aussi l’activité agricole, industrielle et commerciale, si bien que, activité ou non, les trous financiers se creusaient.
 
Et les maîtres-épiciers se rengorgeaient de leur importance, et les galopins-télégraphistes, qui avaient flairé le filon rémunérateur, emboîtaient leurs pas malgré leur méconnaissance générale en matière économique et financière. Finalement, il y avait au moins quatre corporations de vendeurs de vent et de poudres magiques dans l’Union : les élus du peuple, les galopins télégraphistes, les mages-toupies et les maîtres-épiciers. C’était beaucoup pour le pays, et on verra plus tard que j’en oublie.
 
* Ils seront appelés plus tard économistes.
 
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20 janvier 2008 7 20 /01 /janvier /2008 14:28
C’était le blues : il se passait une foule de choses et il ne se passait rien. Les galopins télégraphistes et les officiers du 22ème avaient cessé de s’agiter afin de ménager leurs forces en vue de l’attaque … verbale … qu’ils réservaient à la Grande Squaw devant faire un grand feu public ce dimanche. Mais, toute encombrée des Grands Sachems, elle risquait de ne faire qu’un feu de paille.
 
Il était admis désormais que le Colonel rattache à ses fonctions celles de shérif des National Guards ; la Colonelle, qui était une femme d’intérieur, tenait beaucoup à ce cumul. Nike Stark était ainsi le seul Colonel à une étoile au monde. Bien sûr, c’était un peu juste pour occuper le poste naguère magnifié par un Général à deux étoiles, mais il fallait s’en contenter, les choses n’étant plus ce qu’elles avaient été.
 
On avait beaucoup attendu d’un grand show qui s’était tenu dans un saloon-télégraphe. Son organisation était curieuse : le peuple était confiné dans un cul de basse fosse, le Colonel faisait un numéro de haute école au-dessus dans un nuage transparent et, tout en haut, un galopin célèbre surplombait la scène, tel un dieu morne à l’autorité douceâtre. Les sémiologues apprécieront. Ah ! Ça, le Colonel montait bien, mais la guerre, dans tout cela ?
 
La poussière était un peu retombée sur la Grande Prairie, mais une brume tenace s’était répandue et cachait l’horizon, comme sur le désert des Tartares. On voyait s’y agiter au loin des oriflammes rouges, noirs et verts mais les mages-toupies avaient confisqué les longues vues afin que le peuple n’y distingue pas les mouvements avec trop de précision.
 
Curieusement, les galopins télégraphistes et les mages-toupies s’étaient entichés d’un étonnant personnage qui parcourait la Grande Prairie. C’était un homme normal habillé en homme ordinaire et qui tenait des propos raisonnables. Nos galopins, qui privilégiaient jusque là le style baroque et sulpicien ne laissaient pas de surprendre : où était le piège ?
 
Tout était en place et rien n’avait commencé. Le peuple n’allait pas tarder à taper du pied et à crier « remboursez ! ».
 
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20 janvier 2008 7 20 /01 /janvier /2008 10:20
Tiens, voilà un marin : comme nous venons de l’expliquer, Dom Badbread* haïssait structurellement tous ses collègues, de même que ceux-ci le lui rendaient bien. Mais il y avait pire : c’était un marin habitué à raisonner en milliers de Nautiques tandis les officiers du Colonel, comme nous l’avons vu, ne quittaient guère le champ de manœuvre. Ils se haïssaient donc aussi conjoncturellement sans oublier les raisons évoquées ci-dessous.
 
Les marins sont des gens extrêmement dangereux : ils ne pensent que canons et torpilles et aiment détruire au loin avec précision. Ainsi, Dom avait naguère réduit sans sommation** en pâtée pour chats la plupart des représentants du parti du Colonel Jack Shyrock et cela n’avait jamais été oublié.
 
Depuis, il s’était attaqué aux jeunes, soulevant l’enthousiasme des galopins télégraphistes qui n’avaient plus connu de tels frissons depuis longtemps et avaient à nouveau pu agiter leurs petits sabres de bois contre les gueux. Pour tout résultat, il avait essuyé un grain catastrophique à faire tomber l’échelle de Beaufort. Les galopins, qui n’aiment pas se mouiller dans des aventures calamiteuses et qui venaient d’en prendre avec le référendum, ne le lui pardonnèrent pas.
 
A la vitesse d’un chasse-marée et au milieu des chausse-trapes, il tenta alors de multiplier les chiffres, les points, les caps, les plans, les routes, les vitesses croissantes, les dérives décroissantes, et même les ortho- ou loxodromies et autres lignes géodésiques.
 
Tout cela dans un climat de scepticisme général : les choses semblaient aller de travers alors pourtant que tout allait mieux que si ça avait été plus mal. Et le Colonel Stark, qui ne savait que crier « Chaaargez ! », concevait un grand dépit de ce raz-de-marée scientifique.
 
Passons sur d’autres fortunes de mer : le Matignon était un beau bateau, mais il avait trop longtemps fait tête à des vents contraires, il s’était échoué trop souvent sur des grèves cruelles, ses soutes à poudre prenaient l’eau et ses bordées faisaient régulièrement long feu. Ne fallait-il pas l’envoyer en Inde se faire démanteler ?
 
* Dominique je ne sais plus comment, la phonétique m’a permis d’éviter une traduction peu convenable.
 
** Le Parlement avait été dissous et les parlementaires étaient restés dissolus.
 
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19 janvier 2008 6 19 /01 /janvier /2008 17:27
Le problème était l’accumulation désordonnée de haines. Quelque part dans la vieille Europe, un jeune universitaire marié à une aristocrate, la plus belle fille de Trèves, et nourri par un important industriel allait inventer la lutte des classes, induisant alors que les faibles haïssent les puissants.
 
Ce rat de bibliothèque exilé en Angleterre sur ordre de Bismarck, et qui n’avait jamais travaillé de ses mains se trompait évidemment comme tous les universitaires : ce sont les puissants qui haïssent les faibles. Cela parce que on hait toujours ceux dont on dépend. Et nos robber barons qui ne savaient généralement rien faire, étaient obligés d’exploiter les faibles, donc ils dépendaient d’eux et les haïssaient.
 
Lors du dernier référendum sur l’union de l’Union, ils avaient traîné les gueux dans la boue et cela s’était mal terminé : largement désavoués, nos beaux esprits dominants ne s’en n’étaient pas encore remis et certains, après avoir glapi plus que de raison, se gardaient bien d’offenser à nouveau le peuple ; au contraire, ils lui faisaient de grands sourires pour l'amadouer.
 
A défaut d’oser continuer à insulter les faibles, nos puissants leur installaient avec sadisme toutes sortes d’embûches : interdiction de fumer ailleurs que dans le froid, installation de panneaux de limitation de vitesse sur chaque cactus, et les empêchaient même de rêver en leur ressassant toutes les catastrophes qui attendaient inéluctablement leurs descendants, sans pour autant prendre la moindre mesure de sauvegarde. Mais ils n’osaient pas trop montrer leur joie de se réserver leurs privilèges, et cela les leur gâchait un peu.
 
Comme, pour être puissant, il faut savoir piétiner les autres, donc avoir absolument la capacité de haïr, ils en étaient maintenant réduits à se haïr mutuellement.
 
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18 janvier 2008 5 18 /01 /janvier /2008 16:54
L’ardeur du combat était telle qu’il y avait de plus en plus de poussière sur la Grande Prairie et on n’y voyait goutte ; le lecteur voudra donc bien pardonner la confusion du tableau qui suit et qui, si on avait été en mer, ressemblerait au radeau de la Méduse.
 
Sur le terrain de manœuvres de Fort Nicecalf, les officiers du Colonel traînaient leurs Santiags en compagnie des galopins télégraphistes qui tapaient de la galoche en soulevant des nuages de poussière se répandant sur la Grande Prairie depuis les Rockies jusqu’aux Appalaches.
 
Plus personne n’y voyait rien et chacun prétendait savoir ce qui allait se passer. Les mages-toupies coupaient des epsilons en 4096, force alcool était fraternellement consommé dans l’attente d’un évènement déterminant, c’est pourquoi le manège couvert du fort s’appelait le Palais Bourbon.
 
Tous remâchaient les mêmes vieilles nouvelles insipides comme des chewing-gums achetés d’occasion. Heureusement pour lui, le peuple de l’Union s‘en foutait et vaquait à sa struggle for life quotidienne que les élites darwiniennes lui avaient imposée.
 
Pour ajouter à la confusion, quelques philosophes et historiens au long cours tortueux, et aujourd’hui plutôt démâtés, avaient été attirés par l’odeur de l’eau de feu et rejoignaient les supporters du Colonel. Autant de bouches inutiles qui ne seront plus à nourrir par le Peuple Sioux, autant de poids mort supplémentaire dans les chariots du 22ème de Cavalerie.
 
Pendant ce temps là, le Colonel voyageait à proximité de Washington car son imposant train des équipages aurait trop pollué dans une longue course au fond de la Grande Prairie et, tel le Erlkönig, susurrait « travailleurs, travailleuses, enseignants, enseignantes, pauvres, pauvresses, chers enfants, venez donc avec moi, il y a de nombreuses fleurs … », sans y croire vraiment. C’est qu’il avait un problème.
 
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